Voilà une question qui revient continuellement au cours de nos formations, initiales et avancées, de prof de yoga. Peut-on enseigner une posture qu’on ne maîtrise pas ? Cette question en soulève bien d’autres. Il parait important de définir d’abord ce que signifie maîtriser une posture. Ensuite, il est intéressant de se questionner sur ce que sous-tend la transmission de la pratique posturale et ce qu’on attend d’un.e prof dans ce cadre. Est-ce la souplesse ou l’hypermobilité d’un.e enseignant.e qui garantit la qualité de son enseignement ? Sur quels éléments repose la légitimité d’un.e prof de yoga à proposer certaines postures et pas d’autres ? On vous propose quelques pistes de réflexion dans cet article.

Que signifie maîtriser une posture ?

Lorsqu’on se pose la question de pouvoir enseigner une posture qu’on ne maîtrise pas, est-ce qu’on parle d’asanas qu’on a très peu pratiqués et qui nous sont encore plus ou moins inconnus ? Ou est-ce une posture qu’on a suffisamment pratiquée, ressentie, mais dans laquelle notre amplitude de mouvement est limitée ? Cette question revient à faire une différence importante. Il y a d’un côté la nécessité pour un.e prof de yoga d’avoir du vécu dans la pratique d’une posture et de l’autre le fait de disposer de certaines capacités physiques. Il s’agit de faire la distinction entre la pratique d’une posture et l’amplitude de mouvement qu’on peut développer (ou pas) dans cette posture.

Maîtriser une posture ne signifie pas être assez souple pour se plier en deux. Cela ne veut pas non plus dire qu’il faut ressembler aux photos que l’on voit fleurir sur Instagram. Selon nous, maîtriser une posture, c’est l’avoir suffisamment ressentie et pratiquée dans son propre corps pour pouvoir proposer aux élèves de l’explorer à leur tour.  

Sur quoi repose la légitimité à enseigner une posture ?

Pour mieux comprendre les contours de cette distinction importante, prenons deux exemples volontairement exagérés. Dans le premier cas, nous avons un.e prof qui pratique régulièrement, depuis des années, la pince assise (paschimottanasana). Mais il ou elle n’a pas nécessairement la capacité physique à s’allonger complètement sur ses jambes dans cet asana. Il ou elle a pratiqué cette posture des milliers de fois. Il ou elle en connait les fondations, les activations, les axes de travail possibles. Est-ce que son manque de souplesse lui enlève la légitimité à enseigner la posture ? Bien sûr que non !

Dans le second cas, un.e prof de yoga découvre le travail du handstand (l’équilibre sur les mains) et arrive à tenir quelques secondes en l’air. Il ou elle décide alors d’enseigner un atelier complet sur le sujet après cela. Dans ce cas précis, nous estimons que la transmission de cette posture pose un problème d’honnêteté intellectuelle. Parce que les postures doivent d’abord être ressenties dans sa chair et suffisamment pratiquées pour être transmises. Mais heureusement, ce cas de figure est assez rare. Surtout dans le monde du yoga où le syndrome de l’imposteur est très répandu, malheureusement.

Qu’attend-on de l’enseignement postural du yoga  ?

Si la maîtrise d’une posture était liée à l’amplitude de mouvement qu’on est capable d’accomplir, alors cela signifierait que l’enseignement du yoga serait réservé : 

• aux personnes ayant certaines prédispositions physiques ;
• aux personnes très souples ;
• aux personnes minces (car l’amplitude de mouvement peut être impactée par le volume corporel).

Ce n’est heureusement pas le cas ! Parce que la souplesse et l’amplitude de mouvement d’un.e prof ne définissent pas sa légitimité à enseigner. Ils ne définissent pas la qualité de son enseignement. Il y a malheureusement beaucoup de mythes autour de la pratique du yoga, mais aussi des attentes qu’on peut avoir vis-à-vis de l’enseignant.e.

Le rôle d’un.e prof de yoga dans un cours d’asanas est de pouvoir guider les élèves à travers les postures de façon durable et sécuritaire pour leur corps. Dans le cadre de cette transmission, il s’agit de proposer des consignes d’activation plus ou moins subtiles pour développer des sensations et une meilleure conscience corporelle dans les asanas. Le rôle d’un.e prof est de proposer des pratiques posturales qui permettent aux élèves d’explorer leurs propres amplitudes de mouvement. Il s’agit d’inviter ses élèves à bouger de la manière la plus variée possible pour construire leur force et améliorer leur souplesse.

Alors oui, on peut enseigner n’importe quelle posture. Mais chez ĀYU, nous pensons qu’il faut l’avoir assez pratiquée et ressentie dans son propre corps avant.⁠ Vous souhaitez accompagner vos élèves vers des sensations subtiles et une meilleure conscience de leur corps ? Découvrez toutes nos formations professorales, basées sur des enseignements sourcés et contextualisés.